Le pays des autres en bref
En avril 1947, Mathilde, Alsacienne de 22 ans, enceinte de 2 mois, se rend en carriole avec son époux Amine, Marocain de 30 ans, dans une ferme isolée, à 25 km de Meknès. Elle l’a rencontré en Alsace en 1944. Depuis son arrivée au Maroc, en 1946, elle doit se plier aux règles locales et adopter les rites de la belle-famille et les usages marocains. Elle passe de l’autorité de son père à celle de son mari en s’adaptant à un quotidien austère, où l’expression de ses émotions n’est pas bien accueillie. Elle élève avec difficultés ses deux enfants, Aïcha, qui étudie dans un école catholique, et Selim.
De son côté, Amine a travaillé dur pour récupérer les terres de son père, réaliser des travaux dans la maison et moderniser la ferme. Amine est déchiré entre le retour à sa culture, la référence aux mœurs de ses parents, le respect des traditions et la modernité et son amour pour Mathilde qui porte un autre regard sur la société.
L’incompréhension qui se creuse entre les membres de la famille est représentative de la division de la société marocaine pendant cette décennie.
Le mot de l’éditeur
« “Ici, c’est comme ça.” Cette phrase, elle l’entendrait souvent. À cet instant précis, elle comprit qu’elle était une étrangère, une femme, une épouse, un être à la merci des autres. « En 1944, Mathilde tombe amoureuse d’Amine, un Marocain venu combattre dans l’armée française. Rêvant de quitter son Alsace natale, la jeune femme s’installe avec lui à Meknès pour y fonder une famille. Mais les désillusions s’accumulent : le manque d’argent, le racisme et les humiliations fragilisent leur couple. Dans ce pays ambivalent, qui réclame une indépendance que les hommes refusent pourtant aux femmes, Mathilde réussira-t-elle à poursuivre sa quête de liberté sans heurter ceux qu’elle aime ?
Quelques mots sur l’auteur Leïla Slimani
Née à Rabat en 1981, Leïla Slimani étudie à Paris en 1999 en classes préparatoires littéraires. Diplômée de l’Institut d’études politiques de Paris, et de l’École supérieure de commerce de Paris (ESCP Europe), elle travaille en tant que journaliste au magazine Jeune Afrique. Elle publie en 2014 son premier roman “Dans le jardin de l’ogre” qui est proposé pour le Prix de Flore 2014. Son deuxième roman, “Chanson douce”, a obtenu le prix Goncourt 2016, ainsi que le Grand Prix des lectrices Elle 2017. Elle a rédigé une trilogie sur l’histoire du Maroc et d’une famille : « Le Pays des autres« , « Regardez-nous danser ». Elle est aussi l’autrice d’essais et de bandes dessinées, comme celle inspirée de la vie de Suzanne Noël le tome 1 (1900-1921) et le tome 2 (1922-1954) « A mains nues ». Nous la retrouvons bien évidemment, entre autres, parmi les entretiens de « Femmes puissantes » de Léa Salamé et les portraits « La nouvelle Parisienne » de Lindsey Tramuta.
Notre avis
Avec un style fluide, l’auteur nous plonge dans le Maroc des années 50, avec la cohabitation des colons, la diversité culturelle et les velléités d’indépendance. L’analyse fine de la personnalité des principaux personnages, de leurs valeurs et de leurs aspirations contribue au réalisme du roman. Leïla Slimani nous fait ainsi découvrir progressivement le mode de vie des Marocains à travers les rencontres de Mathilde et les obstacles qu’elle doit franchir pour s’intégrer dans ce pays qu’elle ne connaît pas, dont l’image diffère notamment de celle véhiculée par les artistes français. Elle montre également les points de vue différents d’Amine, de sa sœur Selma et d’Aïcha. Elle met enfin en parallèle le chemin vers l’indépendance du Maroc et l’émancipation des femmes. Ces différentes perspectives illustrent les tensions, les contradictions et les fractures au sein de la société marocaine de cette période de transition.